La start-up montpelliéraine AI-Stroke fait un bond en avant dans la lutte contre les AVC avec le développement d'un neurologue numérique, soutenu par le plus grand jeu de données mondial constitué de 300 patients. Grâce à des vidéos et images, cette technologie promet d'améliorer la détection précoce des AVC, enjeu crucial dans la prise en charge des patients.
La start-up est incubée au BIC de Montpellier (opéré par la métropole de Montpellier), soutenue par la SATT AxLR qui est entrée à son capital et a bénéficié de plusieurs aides de Bpifrance (lauréat de la Bourse French Tech Emergence, des Obligations Convertibles French Tech Seed, et lauréat de la 25ème édition d’i-Lab) et de la région Occitanie (Plan d’Investissement pour l’Avenir régionalisé). (Photo Pixabay)
AI-STtroke, une start-up innovante basée à Montpellier, a franchi une étape majeure dans son développement en constituant un vaste jeu de données pour le pré-diagnostic des AVC. En collaboration avec le CHU de Nîmes, l'entreprise a filmé 300 patients en phase aiguë d’AVC, générant ainsi 20 000 vidéos et 6 millions d’images. Ces ressources permettent à son intelligence artificielle de s’entraîner et d'obtenir des résultats prometteurs dans la détection des AVC. Ce projet illustre l'engagement d'AI-Stroke à utiliser des données réelles pour former son IA, augmentant ainsi la précision des diagnostics.
Les AVC représentent la deuxième cause de mortalité dans le monde, touchant des millions de personnes chaque année. Les victimes perdent en moyenne 2 millions de neurones chaque minute en cas d'accident. Selon une étude, les patients qui arrivent aux urgences dans les trois heures suivant l'apparition des premiers symptômes présentent moins d’invalidité trois mois après l’accident cérébral. Ces statistiques soulignent l'importance cruciale d'une détection précoce et d'une intervention rapide, qui peuvent significativement améliorer les résultats des patients.
Des défis à relever pour une détection précoce
L’urgence d’une intervention rapide est évidente, mais la réalité présente de nombreux obstacles. De nombreux AVC se déclarent en dehors des établissements hospitaliers, ce qui complique la prise en charge initiale. En effet, la variabilité des symptômes d’un patient à l’autre rend le diagnostic difficile. Les pompiers et les urgentistes, qui sont souvent les premiers à intervenir, ne disposent pas toujours des outils nécessaires pour diagnostiquer efficacement les AVC. Près de 40 % des cas d’AVC échappent aux premiers secours, et une étude américaine a révélé que 22 % des AVC ne sont pas détectés lors des consultations aux urgences.
« Prendre en charge un patient dans la fenêtre clinique de soins - au maximum 4 à 6 heures après les premiers symptômes - est un véritable défi », souligne Eric Thouvenot, professeur des universités et praticien hospitalier (PUPH) en neurologie au CHU de Nîmes. « Nous sommes convaincus que la solution développée actuellement par AI-Stroke apportera une réponse satisfaisante à l’un des enjeux majeurs de la prise en charge des AVC : la réactivité. »
Un neurologue numérique à la portée de tous
AI-Stroke a conçu une intelligence artificielle qui fonctionne comme un neurologue numérique, permettant un pré-diagnostic avant l’examen formel par un médecin. Lors de la première évaluation, le neurologue demande au patient d’effectuer quelques exercices simples, tels que « faites un grand sourire », « levez les deux bras » ou « répétez ces quelques phrases ». Ces gestes permettent de vérifier la présence des principaux symptômes caractéristiques de l’AVC, notamment la déformation de la bouche, la faiblesse d’un côté du corps et les troubles de la parole.
Pour établir un diagnostic d’une précision comparable, même lorsqu’un médecin neurologue n’est pas disponible à proximité, AI-Stroke a développé une intelligence artificielle qui peut être intégrée dans une tablette ou un smartphone. Lors de l'évaluation, l'IA filme le patient pendant qu'il réalise ces exercices, puis analyse les vidéos en les comparant aux 6 millions d’images déjà récoltées pendant la constitution du jeu de données. L’IA est ensuite capable d’indiquer si les réactions du patient correspondent ou non à un AVC, fournissant ainsi une première évaluation cruciale.
L’objectif à terme est d’intégrer cette technologie dans les tablettes utilisées par les pompiers lors de leurs interventions. Cela permettrait de communiquer des informations essentielles aux hôpitaux, facilitant ainsi une orientation rapide des patients vers l’un des 150 centres spécialisés en AVC présents sur le territoire. Cette innovation pourrait ainsi réduire le temps précieux perdu avant le diagnostic final du neurologue.
« Maintenant que nous disposons d’un jeu de données très conséquent, nous pouvons concentrer tous nos efforts sur l’entraînement de notre IA, dont les premiers résultats sont plus qu’encourageants », affirme Cédric Javault, CEO d’AI-Stroke.
L'IA parvient déjà à diagnostiquer un AVC dans 74 % des cas, et les performances continuent de progresser avec chaque nouvelle donnée intégrée. Plus AI-Stroke parviendra à collecter de données, plus la précision augmentera, jusqu'à devenir aussi précise qu’un neurologue expert.
Vers des essais cliniques et une mise sur le marché
AI-Stroke prévoit de lancer les premiers essais cliniques en 2025, une étape cruciale avant la mise sur le marché envisagée pour fin 2026. L’intégration de l’IA dans le processus de détection des AVC pourrait révolutionner la manière dont les AVC sont diagnostiqués et traités, offrant une réponse rapide et efficace aux victimes d'accidents cérébraux.
La start-up se positionne ainsi comme un acteur clé dans la lutte contre les AVC, alliant innovation technologique et impératif de santé publique. Les résultats obtenus à ce jour renforcent l'espoir d'une détection précoce et d'une meilleure prise en charge des AVC, contribuant à réduire les séquelles neurologiques pour les patients.