Carole Delga : "Je serai très vigilante sur la situation des entreprises en Occitanie"

Alors que les collectivités locales sont sollicitées pour contribuer au redressement des finances publiques, la Région Occitanie s’apprête à affronter 2025 avec des choix financiers difficiles, mais déterminés, tout en continuant de soutenir les secteurs vitaux pour son développement et son attractivité. Voici les annonces faites par Carole Delga.

Face aux importantes économies exigées par l'Etat, Carole Delga, présidente PS de la Région Occitanie, a fait plusieurs annonces, jeudi 14 novembre 2024. (Photo : Archives - Entreprises Occitanie)

Face aux importantes économies exigées par l'Etat, Carole Delga, présidente PS de la Région Occitanie, a fait plusieurs annonces, jeudi 14 novembre 2024. (Photo : Archives - Entreprises Occitanie)

La France traverse une période de turbulences économiques et financières qui laisse entrevoir des conséquences durables. En effet, l'endettement public a considérablement augmenté en seulement sept ans, passant de 2 258 milliards d'euros en 2017 à 3 200 milliards en 2024.

Effet domino sur les finances publiques

Cette augmentation de la dette publique de 1 000 milliards d'euros a généré une hausse des taux d'emprunt pour l'État français, aujourd'hui bien plus élevés que ceux de ses voisins européens. Si cette tendance se poursuit, le remboursement de la dette pourrait, dans quelques années, dépasser celui de secteurs aussi cruciaux que l’éducation nationale, menaçant ainsi la pérennité de services publics essentiels.

Cette situation a un effet domino sur les finances publiques, créant une pression sur les investissements et les services publics locaux, notamment dans les régions.

Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, souligne qu'en dépit de cette situation alarmante, il est primordial de continuer à soutenir des secteurs clés comme l’éducation, la santé, et la sécurité, qui contribuent au bien-être des citoyens. Elle insiste également sur le besoin urgent de renforcer l’accompagnement des entreprises en difficulté, d’autant plus que le nombre de défaillances d’entreprises a fortement augmenté. Elle détaille :

"Dans ce contexte économique difficile, il est essentiel que les efforts budgétaires soient partagés de manière équitable. Les Régions ne doivent pas être les seules à supporter la charge des ajustements financiers. Il est de la responsabilité de l'État de prendre en compte les réalités locales et de respecter ses engagements."

Le PLF 2025, un coup dur pour les Régions

Le Projet de Loi de Finances pour 2025 annonce un effort budgétaire majeur pour ramener le déficit public à 5 % du PIB. Cet effort repose en grande partie sur une série de mesures d'austérité, dont 6,3 milliards d'euros de baisses de dotations pour les collectivités locales. Les Régions, en particulier, doivent assumer une part disproportionnée de l’effort demandé par l'État, alors qu'elles ne représentent que 7,8 % de la dette publique, mais assurent 60 % de l'investissement public, dont 12 % pour les seules Régions.

Une perte de 1,4 milliard d'euros en 2025

Dans ce contexte, la Région Occitanie, déjà fortement impactée par les baisses de recettes, devra faire face à une perte de 1,4 milliard d’euros en 2025. Cela aura un effet direct sur les projets régionaux, notamment en matière de transports, de formation, et de développement des infrastructures, impactant ainsi la qualité des services publics et l’investissement nécessaire pour maintenir son rôle de moteur économique et social.

Repenser le financement des infrastructures ferroviaires
La collectivité a décidé de ne plus compenser le désengagement progressif de l’État dans ce domaine, malgré les alertes répétées de la présidente sur la nécessité de repenser en profondeur le modèle ferroviaire français pour répondre aux urgences actuelles.
La Région Occitanie, en partenariat avec la Nouvelle-Aquitaine, envisage également d’optimiser ses investissements en reportant certaines acquisitions de matériels roulants, avec une commande de 10 trains minimum, d'une valeur de 93 millions d'euros.
La Région continuera de soutenir des projets structurants pour le réseau ferroviaire, tels que la réouverture de lignes secondaires, comme Montréjeau-Luchon, Alès-Bessège et Rive Droite du Rhône. Elle poursuivra également les projets de lignes à grande vitesse (GPSO et LNMP), tout en menant une réflexion sur d'autres lignes régionales, notamment Limoux-Quillan et Rodez-Séverac.

Une solidarité régionale mise à l’épreuve

Depuis 2017, les Régions ont été sollicitées pour participer activement à la solidarité nationale. Lors de la crise sanitaire, elles ont pris une part importante dans la gestion de la crise, tout en soutenant la relance économique, notamment par le financement de la transition énergétique et des mobilités décarbonées.

En dépit de leurs efforts, les Régions n’ont pas été compensées pour les surcoûts énergétiques liés à l'inflation, contrairement à d’autres niveaux de collectivité. Elles se trouvent aujourd'hui dans une position où les efforts demandés deviennent insoutenables.

Carole Delga dénonce ces choix unilatéraux de l’État et affirme qu'il est injuste de demander aux Régions de supporter une part disproportionnée de l’effort de réduction des déficits publics. Elle insiste sur le fait que ces décisions impactent non seulement les finances des Régions, "mais aussi les conditions de vie des citoyens, en particulier dans les zones rurales et moins favorisées".

Un défi de taille

La Région Occitanie, qui connaît une forte dynamique démographique et une croissance continue de ses besoins en infrastructures (lycées, transports, etc.), est particulièrement touchée par ces baisses de financement. En 2023 et 2024, elle a déjà subi une perte de près de 210 millions d'euros en recettes, et la perspective d’une nouvelle réduction de 187 millions d’euros en 2025 représente un défi majeur pour son budget. En dépit de ces baisses, la Région s’engage à maintenir ses priorités : la santé, l’emploi, et l’amélioration du pouvoir d’achat pour ses habitants.

Révision des priorités

Les choix à venir pour 2025 devront être faits avec une prudence extrême. Carole Delga affirme que la Région ne pourra pas continuer à pallier les désengagements de l'État, notamment en matière de rénovation énergétique et d’investissements ferroviaires, secteurs où l’État est le principal responsable. La Région prévoit également une révision de ses priorités, avec un accent particulier sur les dépenses qui ont un impact direct sur les citoyens et les secteurs clés de son économie.

Réorganisation des agences régionales
Dans un souci d’optimisation des ressources, Carole Delga a engagé un processus de réduction du nombre d’agences régionales. Entre 2016 et 2020, la Région a procédé à une réduction significative, passant de 17 à 7 agences, ce qui a permis de réaliser une économie de 22,5 millions d'euros.
À partir de 2024, de nouvelles fusions seront mises en place pour rationaliser davantage le fonctionnement des agences. Ainsi, la culture régionale sera centralisée en une agence unique qui regroupera les structures actuellement dédiées à l’audiovisuel, à la littérature et aux événements culturels. Pour 2025 et 2026, la création de deux grandes agences est prévue : l'une pour le développement économique et l’attractivité, englobant le secteur du tourisme, et l’autre dédiée à l’aménagement du territoire et au climat, incluant la gestion des projets fonciers et énergétiques. Cette réorganisation permet de réduire le nombre d’agences de 7 à 3, générant une économie prévisionnelle de 17 millions d’euros d’ici 2028. Cette démarche vise à améliorer l'efficacité tout en garantissant qu’aucun licenciement ne soit envisagé.

La Région Occitanie veut garder le cap

Malgré les difficultés, la Région Occitanie continue de faire preuve d’une gestion financière responsable et rigoureuse. La capacité de désendettement de la Région s’élève à 6,6 ans, ce qui la place bien en dessous du seuil d’alerte de 9 ans fixé par la loi pluriannuelle des finances publiques. Cette gestion permet à la Région de maintenir des marges de manœuvre pour continuer à investir dans des projets indispensables pour son développement économique et social, tout en assurant une stabilité financière.

La Région a d’ores et déjà amorcé une série de mesures d’économies, avec notamment un gel de la création de nouveaux postes, la réduction du nombre d’agences régionales et une rationalisation des dépenses de fonctionnement. Parmi les économies envisagées, la fusion de certains dispositifs, comme ceux dédiés à la rénovation énergétique, devrait permettre d’économiser plusieurs millions d’euros chaque année.

Soutien renforcé aux entreprises
Face aux difficultés rencontrées par certaines entreprises, la Région Occitanie met en place des mesures supplémentaires pour soutenir leur redressement. Le « Contrat Entreprise en Difficulté », relancé par la collectivité, permet aux PME en situation de restructuration de bénéficier d'une avance remboursable à taux zéro, pouvant atteindre 500 000 euros. Ce soutien vise à assurer la viabilité à long terme des entreprises en difficulté.
En complément de ce dispositif, un nouveau fonds régional, intitulé Occitanie Rebond, sera lancé en 2025 avec un budget de 30 millions d'euros. Ce fonds se concentrera principalement sur les entreprises industrielles ou celles ayant un fort impact sur l’emploi et la souveraineté, qui peinent à trouver des financements pour leur redressement. La Région interviendra à hauteur de 3 à 5 millions d'euros pour aider ces entreprises à surmonter leurs difficultés financières et à retrouver une stabilité à long terme.

Maintien des priorités pour 2025

Pour 2025, la Région Occitanie maintiendra ses priorités : soutenir le pouvoir d'achat des familles, encourager l'emploi local, et renforcer l’accès aux soins de santé. Des initiatives comme la rentrée scolaire la moins chère de France, la gratuité des transports pour les jeunes, et la prolongation du train à 1 euro pour les salariés font partie des mesures qui continueront de bénéficier aux habitants de la Région. 

Carole Delga souligne :

"Malgré ces contraintes, nous restons engagés à soutenir nos territoires, nos entreprises, et nos citoyens. Notre priorité restera d’investir dans l’avenir, en particulier dans l’éducation, la santé, et les transports. Je serai également très vigilante à la situation des entreprises sur notre territoire."

La Région met également en place des dispositifs pour accompagner les entreprises et soutenir l'agriculture et la viticulture, secteurs fondamentaux pour son économie. Un soutien particulier est apporté aux entreprises en difficulté, avec la mobilisation du fonds souverain régional et d’autres dispositifs d’aide pour les entreprises créatrices d’emplois.

L'Occitanie, toujours leader européen de l'innovation en santé ?
La Région Occitanie veut continuer à s'affirmer comme un acteur majeur dans la transformation du secteur de la santé et des biotechnologies en Europe. Avec 730 entreprises et 25 000 salariés hautement qualifiés, la filière régionale se trouve confrontée à de nombreux défis, notamment face à une mondialisation accrue et une forte dépendance à la production étrangère. L'industrie pharmaceutique se concentre, tandis que l'innovation et les nouvelles technologies transforment rapidement le paysage.
Pour répondre à ces enjeux, la Région Occitanie a mis en place un contrat de filière santé de 150 millions d’euros, co-construit avec les acteurs du secteur. Ce contrat vise à relocaliser des projets industriels, à créer de nouvelles entreprises axées sur l’innovation, et à positionner la région comme un leader en biothérapie et en intelligence artificielle appliquée à la santé. Il prévoit également des initiatives pour favoriser un vieillissement en bonne santé de la population. Ce projet sera présenté plus en détail en décembre 2024.

A lire aussi