Interview de Laurent Pinéda, DG des Forges de Niaux
Forges de Niaux conçoit et fabrique des pièces d’usure dans le domaine des agroéquipements, plus particulièrement des disques pour machines et semoirs agricoles. Située à Niaux en Ariège, sur un site exploité depuis 1881,cette entreprise de forge industrielle de 125 personnes transformant 13 000 tonnes d’acier par an, exporte 85% de sa production sur les 5 continents. Ses produits sont principalement destinés au marché des constructeurs de machines agricoles (60% des ventes) ainsi qu’au marché des pièces de rechanges par l’intermédiaire de grossistes et réseaux dans la profession. Forges de Niaux est devenu un des principaux acteurs mondiaux du disque agricole, produisant environ 2 millions de pièces par an, et misant sur une évolution constante de la qualité de ses produits qui s’adressent à un marché haut de gamme.
Le marché du machinisme agricole subit une baisse importante ?
La chute des cours des céréales, de la canne à sucre, du caoutchouc…a entraîné un effondrement du marché du machinisme agricole dans le monde de 25% sur 2013-2014 et de 20% sur 2014-2015. Notre chiffre d’affaires a été trés impacté en 2014 mais nous revenons à un niveau de 23M environ cette année. Dans ce contexte difficile, la bonne nouvelle c’est que nous gagnons de nouveaux clients avec notre gamme Niaux 200 qui offre les produits les plus performants du marché. Les retours de nos clients constructeurs sont de plus en plus favorables. Ils nous confirment que la durée de vie de nos disques a progressé de 60% à 150% environ suivant les applications.
Quelles sont les atouts de Niaux 200 ?
Nous avons en 2002 démarré un projet à partir d’une nouvelle nuance d’acier élaborée en interne. A l’instar des composites nous avons amélioré sur les zones extérieure du disque, la résistance à l’usure et sur les zones intérieures, la flexion en absorbant mieux l’énergie par la ductibilité. En ha de travail on passe de 4000 à 8 000 ha en moyenne. Le contexte est porteur. Les exploitants agricoles cherchent à réduire les coûts d’exploitataion avec des outils plus larges tractés à des vitesses croissantes, mais qui sollicitent davantage les disques. La puissance des tracteurs agricoles utilisés en Europe et aux Etats-Unis, va de 190 ch à 250 ch avec des vitesses de travail de 15 à 25 km/h contre 6 à 8 km/h dans le reste du monde.
Quelle est votre part de marché ?
La commercialisation de Niaux 200 a démarré en 2010. Nous avons stoppé la précédente gamme de produits pour nous concentrer sur la nouvelle en équipant les conceptions premium des constructeurs. Aujourd’hui un disque sur deux en Europe est produit par Forges de Niaux, nous occupons 2,5% du marché mondial. Certains clients choisissent une fourniture à 100% de leur besoins assemblés sur leurs machines ainsi que leur besoin en pièces de rechange. Cinq ans après le lancement de Niaux 200, et dans cette période de crise touchant le secteur du machinisme agricole, le marché commence à redécouvrir les avantages de la qualité plutôt que la recherche systématique du prix le plus bas. Forges de Niaux équipe en première monte les constructeurs. Nous les accompagnons dans la conception de leur produit, nous réalisons également en commun l’analyse de la valeur. L’entreprise continue par ailleurs à travailler sur des évolutions futures sur la qualité produits, des ruptures technologiques sont certainement envisageables. Nous sollicitons des agriculteurs pour tester les nouveaux produits sur des terres difficiles à travailler.
Quelles sont les perspectives ?
Nous restons optimistes car les besoins agricoles sont immenses à l’échelle de la planète et vont augmenter. A cette échelle la part des produits de qualité que nous commercialisons représente une part infime du marché. Présent sur les 5 continents, Forges de Niaux a tissé un réseau de vente à l’international, avec des partenaires en Allemagne, en Thaïlande, au Canada. Nous serons également bientôt présents à Chicago.
Forges de Niaux est déjà fortement robotisée ?
Le premier robot est entré dans l’usine en test en 2008 et en production fin 2009. Le parc comprend 14 robots, nous allons continuer à nous équiper. La manutention n’est pas une valeur ajoutée. La productivité et le confort de travail s’améliorent. Nous avons fait le choix d’être totalement autonomes dans la conception des postes, la programmation, avec deux ingénieurs robotiques et un technicien automaticien. Nous avons ainsi la maîtrise et la confidentialité complète de nos process de production. Forge de Niaux a profité de l’industrialisation de Niaux 200 pour introduire la robotique associée à des nouvelles technologies, le prototypage rapide, moderniser ses moyens de traitement thermique, augmenter sa capacité de production dans le cadre d’un plan d’investissement de 7 M€ sur 2009-2013.
Le projet de nouvelle usine est toujours à l’étude ?
La forte baisse du machinisme agricole nous a conduits à reporter le projet. Mais si comme nous l’espérons le marché redémarre sur 2016-2017, nous le lancerons opportunément. Nous prévoyons d’investir environ 10M€ avec la création d’une nouvelle usine en Ariège. Aujourd’hui nous sommes sur un site isolé de toute synergie industrielle, en territoire de montagne. L’objectif est de construire une usine du futur en optimisant l’ensemble du cycle industriel et logistique tout en donnant une nouvelle dynamique collective. Elle sera dimensionnée pour passer de 2 millions de disques /an à 3 millions/an avec des possibilités d’extension. Il faudra peut-être à terme envisager de se rapprocher de nos clients stratégiquement sur les marchés éloignés qui pourraient croître fortement à l’avenir.
Chiffre :
Effectif : 125 salariés
Chiffre d’affaires : 23 M€ en 2015/16 (prévisions), 85% à l’export.
Les principaux clients :
Horsch, John Deere, Grégoire & Besson, Kverneland , Kubota, Yanmar, Case, SMA….
International :
15% France, 43% Europe-Russie, 23% Asie, 7% Amérique du Nord, 6%, Afrique, 4% Amérique du Sud, 2% Australie-Nouvelle Zélande
Parcours :
Laurent Pinéda a démarré sa carrière dans la métallurgie en travaillant notamment chez Manoir Industrie. Il est entré en 2000 aux Forges de Niaux comme directeur technique. En 2009 il prend la direction générale de l’entreprise et impulse une nouvelle dynamique. « Nous avons eu beaucoup d’audace en 2008 en lançant notre projet d’investissement ». La famille Grenier contrôle toujours le capital de cette entreprise ariégeoise avec Laurent Pinéda et un partenaire allemand.
Article diffusé le 01/01/2016 par JL Bénédini