De g à d : Arnaud Guérin et Renaud Allioux
Si plusieurs acteurs se sont positionnés sur le hardware en Europe ou sur d’autres segments tels CLS avec Argos ou 4Skies pour le M2M, l’entreprise toulousaine Earthcube est la première à offrir des services d’observation à partir de nanosatellites. « Le marché est à présent mur pour lancer des applications correspondant aux besoins des industriels » estiment Arnaud Guérin et Renaud Allioux, les co-fondateurs de la société en évoquant l’intérêt de cette solution pour surveiller les installations sensibles, prévenir et détecter les risques environnementaux ou autres.
Ainsi, monitorer 3 millions de km de pipeline via une petite constellation de « nanosats » permet avec un passage en continu, d’avoir un état de situation régulier. Et de déceler en 24 h la présence d’une fuite, souvent repérée actuellement au bout de 15 jours ! Outre la réduction de l’impact environnemental, une gestion plus rapide des interventions améliore la sécurité des hommes au travail (1) et génère des gains économiques (moins de déplacements sur le terrain pour réaliser les contrôles, moins de pertes de pétrole). Sur les exploitations offshore, les petits satellites peuvent aussi signaler la présence de bateaux sur la zone, lesquels avec leurs ancres sont susceptibles d’abîmer les tuyaux sous-marins. Total a bien accueilli l’offre d’Earthcube, retenant cette PME parmi les finalistes de l’Usine 4.0 (son incubateur de start-up). D’autres pétroliers ont aussi manifesté leur intérêt.
En fait, le champ des applications est très large. La Défense, l’Internet des objets, la météo, l’observation de la terre (missions scientifiques, environnementales, sécurité incendie)…autant de domaines qui peuvent être adressés. « En fait, notre solution est complémentaire des autres services et applications satellitaires car nous comblons un trou dans la raquette avec un passage quotidien sur les sites à observer » précise Renaud Allioux.
Avec une dizaine de nanosatellites au démarrage pour une couverture toutes les 24 h, cet acteur du spatial mise sur une qualité de service exceptionnelle, liée à la charge utile (caméra de pointe …) et à la finesse de résolution des images en dépit de leur grandeur. « Nous avons spatialisé des technologies utilisées dans d’autres secteurs» complète Arnaud Guérin en citant les partenariats noués avec l’Onera (pour l’instrument optique) et avec le CNRS (pour le traitement des images). Pour affiner la prestation, seront aussi exploitées les prises de vues et données émanant de Sentinel (programme Copernicus) et d’autres satellites.
Quant au parti pris technologique, Earthcube a opté pour des smallsats opérant en orbite basse (500 à 600 km). Côté lanceurs, le marché évolue avec des offres qui seront plus compétitives avec l’arrivée prochaine de nouveaux acteurs développant des véhicules spatiaux dédiés aux nanosats. Ils pourront emporter jusqu’à 300 kg de charge utile.
Avec une équipe de 8 personnes, la start-up hébergée à l’Incubateur Midi-Pyrénées devrait dès 2018 proposer les premiers services. En attendant, la R&D se poursuit pour être au top sur la charge utile et les applications. Un test sur ballon stratosphérique va être réalisé pour valider les concepts, une démonstration avec un avion suivra en attendant de lancer le premier prototype nanosat en 2017 industrialisé par un tiers.
Pour financer toutes ces étapes et accélérer la commercialisation du service, une première levée de fonds est programmée au second semestre 2016. « Nous sommes confiants car il y a une volonté de la part des institutionnels et des acteurs économiques de booster la filière nanosatellites qui émerge en Europe et Amérique du Nord » conclut Arnaud Guérin.
Emma Bao
Diffusé le 2 juin 2016
(1) : Aux USA, dans les exploitations pétrolières, une centaine de personnes sont blessées par an.
A retenir
-Earthcube est incubé par l'ESA BIC sud France
La société est lauréate de la bourse French Tech Emergence de BPIfrance.
Un duo aux compétences complémentaires
Titulaire d’une thèse cofinancée par Airbus Defence & Space et le Cnes, Renaud Allioux a travaillé sur les satellites (instrumentation, grandes missions…). Ingénieur de formation, Arnaud Guérin connait bien l’univers professionnel de l’énergie avec 12 années d’expérience dont 6 chez Areva où il a exercé différentes fonctions (directeur de R&D de la plus grosse BU du groupe, direction d’une filiale du groupe en Chine). Leurs savoir-faire complémentaires sont un atout pour la réussite commerciale d’Earthcube, premier fournisseur de services nanosats sur l’Europe.