Réacteur installé à la MEPI développé en SiC par Boostec
La MEPI, la Maison Européenne des Procédés Innovants installée sur l’Ile du Ramier à Toulouse est associée depuis un an et demi à un projet européen avec Sanofi à Montpellier et l’Université de Durham en Angleterre en exploitant un réacteur développé en Carbure de Silicium (SiC) par Boostec dans les Hautes-Pyrénées. L’enjeu est considérable car il s’agit de rendre accessible la Flucytosine aux populations africaines atteintes par le SIDA, responsable de la mort (directement ou indirectement) de 2 millions de personnes chaque année. 650 000 sont susceptibles d’être sauvées grâce à cette molécule qui traite efficacement les infections fongiques (méningites). Le coût actuel de fabrication de la Flucytosine est un frein majeur à sa mise à disposition des pays africains.
Ce projet fait partie du programme « Innovative Medicines Initiative CHEM21 » (IMI chem21) soutenu par l’Union européenne et l’industrie pharmaceutique comprenant une vingtaine d’acteurs dont six industriels et des laboratoires académiques. L’Université de Durham en Angleterre, spécialisée dans la chimie du fluor, a démontré la faisabilité scientifique et l’efficacité de la réaction chimique de fluoration associée aux procédés intensifiés. « Nous sommes venus chercher à la MEPI une compétence industrielle dans la production micro fluidique à l’échelle industrielle développée ici à Toulouse depuis 2010 grâce aux nouveaux procédés intensifiés» indique Alain Rabion, expert chimie Affaires Industrielles chez Sanofi. En phase de production, le microréacteur de la MEPI a fourni 1 kg/jour de matière première. « Sans l’expertise de la MEPI dans cette chimie du fluor en réacteur micro fluidique, nous n’aurions pas pu développer cette chimie au stade pilote aussi rapidement » poursuit Alain Rabion. La seconde étape du projet sera réalisée par Sanofi à Montpellier en transformant la molécule brute fournie par la MEPI, en principe actif conforme à la pharmacopée internationale. «Notre objectif est de réduire d’un facteur dix le coût de fabrication de la molécule » relate A Rabion. Une évaluation technico-économique sera ensuite conduite avec l’Université de Durham, Sanofi et l’Europe qui attend avec impatience les résultats finaux. Cette molécule fait partie de la liste des médicaments considérés comme essentiels par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Le microréacteur utilisé par la MEPI pour fabriquer la Flucytosine a été conçu par le spécialiste mondial du SiC, la société Boostec, basée à Bazet près de Tarbes, en coopération avec le Laboratoire de Génie Chimique de l’ENSIACET à Toulouse, cherchant ainsi à se diversifier au-delà du segment spatial. « Ce matériau est à la fois inerte chimiquement et facilite les échanges thermiques. Il évacue la chaleur 15 fois mieux que le métal qui est lui-même 15 fois meilleur que le verre soit environ 200 fois plus efficace. Nous avons été les premiers dans le monde à tester à l’échelle industrielle, ce matériau pour la chimie exothermique. Il est parfaitement adapté à la réaction de fluoration de Sanofi » indique Laurent Pichon, le Président de la MEPI où une trentaine d’études différentes ont été déjà réalisées avec le SiC.
Depuis le début de l’année 2016, la MEPI est de plus en plus sollicitée par des clients français et internationaux en pharmacie, en chimie fine, dans la cosmétique pour tester une réaction chimique, démontrer la faisabilité industrielle avec les procédés intensifiés dont la dimension physique est réduite d’un facteur 10 000 par rapport au procédé batch (la gamelle) traditionnel. « En quelques mois nous sommes capables de proposer des solutions composites avec plusieurs réacteurs » indique L. Pichon. La MEPI compte une cinquantaine de clients à travers le monde et près de 1500 prospects.
Déménagement de la MEPI ?
Mis en service en 2009 avec le soutien de l’Europe, de l’Etat, de la région, la MEPI a pour mission d’aider au développement de nouveaux procédés industriels en chimie verte, plus efficaces, plus sûrs. Après l’explosion d’AZF, les pouvoirs publics souhaitaient donner un nouvel élan à la chimie toulousaine et son écosystème universitaire et industriel en pariant sur la R & D appliquée. Son installation sur l’Ile-du-Ramier au sein du site d’Airbus Safran Launchers dans un site dédié et sécurisé est aujourd’hui remise en cause par la Dreal ! Une logique économique difficile à comprendre !
Article diffusé par Jean Luc Bénédini.