400 recrutements dont 200 en France, une nouvelle usine d’assemblage au Québec à proximité de son client Bombardier, 100 M€ d’investissements programmés sur 5 ans sur le site de Saint-Nazaire…Aerolia poursuit sa dynamique de croissance. L’occasion pour son président, Christian Cornille de faire le point sur les moyens mobilisés, l’outil industriel, les relations nouées avec les fournisseurs et la stratégie internationale.
EMP : Pouvez-vous faire un premier bilan de la charte signée avec 20 sous-traitants en Midi-Pyrénées ?
Christian Cornille : Partageant un même destin, nous avons des obligations à remplir pour livrer un produit de qualité dans les délais impartis. Nos partenaires se sont engagés auprès de nous pour réussir ce challenge et de notre côté, nous les soutenons sous plusieurs formes. Nous conduisons ainsi avec 4 Pme dont Aeroteam et Figeac Aéro, des projets de R&D avec la volonté de partager la propriété intellectuelle. C’est le cas pour Aeroteam sur le soudage des alliages de titane par faisceau d’électrons. Via la R&D, nous aidons ainsi les entreprises à grandir, à franchir un palier technologique.
Dans le cas de notre parc aéronautique d’Aerolia en Tunisie, notre partenariat va jusqu’à garantir aux sociétés qui nous ont suivi, un volume de commandes assurant dès le départ une rentabilité et un équilibre financier. Ainsi, tout nouveau contrat est un « plus » pour ces sociétés.
EMP : La supply chain d’Airbus est soumise à forte tension tout comme celle d’Aerolia. Les wagons ont-ils du mal à se raccrocher à la motrice ?
Ch. C. : Mettre en œuvre les capacités pour faire face à l’augmentation des cadences est un processus long, pas toujours compatible avec le cycle du donneur d’ordres. Il faut investir en moyens de production et surtout trouver une main-d’œuvre qualifiée qui se fait rare sur certains métiers de l’aéronautique.
Airbus ayant l’approche la plus anticipative vis-à-vis de ses sous-traitants et partenaires, nous sommes ainsi en mesure de donner un maximum de visibilité à nos fournisseurs, même si parfois la situation intérieure d’un pays, comme en Tunisie par exemple, peut contrarier certaines prévisions.
A présent, le pari de la capacité est quasiment gagné, les entreprises ont multiplié les investissements pour monter en charge.
L’autre problème est culturel. Livrer à l’heure avec la qualité garantie n’est pas au départ dans l’ADN des sous-traitants de l’aéronautique. Nous devons donc poursuivre les efforts de communication pour expliquer à toute la chaîne des fournisseurs nos attentes et celles du client.
EMP : Le parc aéronautique d’Aerolia en Tunisie est-il finalisé ?
Ch. C. Mobiliser les capacités s’est avéré plus long que prévu, notre parc, en raison de la Révolution, a pris un retard de 6 à 7 mois par rapport au calendrier fixé. Aujourd’hui tous les acteurs sont en ordre de marche et un récent Award que nous avons reçu de l’Etat tunisien témoigne de notre volonté de « transformer l’essai » alors que 200 sociétés ont quitté le pays.
Ce concept de parc initié en 2009 est une première mondiale et 6 PME françaises aux savoir-faire complémentaires nous ont accompagné à M’Ghira.
Le principe de ce parc est « simple » : nous rentrons d’un côté de la matière et nous livrons de l’autre côté du parc des sous-ensemble complets à Méaulte comme bientôt également directement à Airbus sur son site de St-Nazaire.
La première tranche de notre usine est achevée depuis janvier 2011. Figeac Aéro et Mécahers ont pour leur part démarré l’activité dans des locaux provisoires avant de rejoindre leurs bâtiments. Depuis le printemps dernier, les unités de production de Mécaprotec (traitement de surface) et celles de Corse Composites sont opérationnelles. Mécanyvois (outillage) est prêt depuis deux ans. Blondel (logistique) vient d’emménager dans ses nouvelles installations.
Le parc emploiera à terme 1500 personnes dont 850 salariés d’Aerolia.
EMP : Quelles sont les répercussions de votre implantation au Québec ?
Ch.C. : Bombardier nous ayant confié la conception et la production de l’intégralité du fuselage central des avions d’affaires Global 7000 et 8000, Aerolia dispose depuis juin 2011 d’un BE à Montréal qui mobilise une centaine d’ingénieurs sur ce programme. Nous avons annoncé fin juin à Montréal la prochaine installation, à proximité de notre client, d’une usine d’assemblage. Le projet atteint les 60 M€ qui englobent les dépenses de R&D et la mise en place de l’outil industriel. Le gouvernement québécois nous apporte un soutien de 15 M$ canadiens.
Dans le contrat de Bombardier, il faut voir un dispositif en trois parties : un positionnement proche du client, un volet compétitivité avec production en low cost en Tunisie et la consolidation du savoir-faire en France. Saint-Nazaire acquiert à cette occasion une compétence supplémentaire avec l’assemblage de sous-ensembles du tronçon central.
Notre objectif chez Aerolia est d’assurer notre développement dans le respect de nos sites historiques en France, c’est ce que nous faisons depuis notre création. Nous maintenons l’excellence et l’avance technologique sur tous nos sites ; la filiale au Québec sera aussi une opportunité pour nouer des liens avec la supply chain locale de Bombardier.
EMP : Le Canada est-il une ouverture sur le marché nord-américain ?
Ch. C. : A l’instar d’Airbus, nous nous « américanisons » car le marché des aérostructures est en Europe mais aussi aux USA. Pour conquérir de nouvelles parts de marché, nous avons un travail de lobbying à effectuer et le Canada sera notre tête de pont. Les ingénieurs, 150 au plus fort du développement de l’avion d’affaires de Bombardier, iront pour une partie sillonner le continent nord-américain alors que le nombre des compagnons canadiens augmentera en ligne d’assemblage.
EMP : Vous êtes impliqué au sein du comité régional stratégique de la filière aéronautique ?
Ch. C. : Nous menons plusieurs actions comme celles sur l’euro-dollar ; dans mon groupe de travail, nous évaluons la pertinence du modèle risk-sharing tout comme nous réfléchissons sur l’optimisation des relations clients-fournisseurs. Tout converge pour que ces derniers bénéficient a minima d’une visibilité à 6 mois de la part des donneurs d’ordres.
Emma Bao
Diffusé le 30-08-2012
Encadré :
Focus
-CA 2011 d’Aerolia : 864 M€
-Effectifs : 3100 personnes
- près de 600 pointes et fuselages à produire en 2012
-220 M€ investis depuis 2009 sur le site de Méaulte pour la production en métallique et composite de l’A350
-100 M€ d’investissements sur 5 ans prévus sur