BIOMATERIAUX : Carole Leonard, DG de Teknimed : « Nous devons préparer le franchissement d’un palier, celui des 10 M€ ! »



Teknimed fournit 40% du marché mondial des ciments destinés à la chirurgie de la colonne vertébrale. Réalisant 90% du CA à l’international avec une présence dans 120 pays, cette entreprise de biomatériaux est devenue un acteur majeur dans l’orthopédie, le rachis, la ligamentoplastie, le maxillo-facial et le dentaire. « Nous sommes le seul fabricant à cumuler les 4 savoir-faire, polymères résorbables, textiles, ciments acryliques et phosphates de calcium ce qui favorise le mixage des procédés, impulse l’innovation » souligne Carole Leonard, directrice générale, poste qu’elle occupe depuis moins de 3 ans.

EMP : Quelles ont été vos priorités à votre arrivée ?

Carole Leonard : J’ai pu capitaliser l’expérience acquise à travers mes divers employeurs et les multiples chantiers dans lesquels je me suis investie. Dans mes missions, j’ai souvent joué le rôle de coordonnateur entre corps de métiers peu habitués à se parler et entre différents acteurs liés à l’acte de bâtir. Je me suis donc attelée d’entrée à l’administration et à la gestion pour optimiser l’organisation, favoriser la communication et le reporting…D’ici deux ans, l’objectif est de mettre en place un contrôle de gestion. Mes efforts ont aussi porté sur le marketing pour renforcer la visibilité de la marque, conforter l’image de nos produits à la fois innovants, techniques et de grande qualité. Le site Internet a également été relooké dans cette optique. Mes compétences sont complémentaires de celles d’Alain Leonard,  un PDG toujours passionné de R&D et qui a su conduire la PME à la réussite.

EMP : Teknimed prend un nouvel élan, cela se traduit comment ?

C. L. : En croissance de 20%, notre chiffre d’affaires atteint cette année les 7 M€. Il faut à présent préparer le franchissement d’un palier, celui des 10 M€. Nous anticipons l’échéance en investissant dans l’outil de production. Parmi les événements marquants, nous venons d’acheter derrière notre site implanté à l’Union un bâtiment de 1000 m2. Cet ensemble est en rénovation pour y aménager des bureaux ; sur l’établissement toulousain seront étendues la surface des salles blanches et la zone de stockage. Sur l’unité historique située à Vic-en-Bigorre, les bureaux et la partie stocks ont aussi été agrandis. La montée en puissance s’accompagne aussi de recrutements, nous sommes déjà une équipe de 45 salariés et nous poursuivons les embauches.

EMP : Comment financez-vous votre développement ?

C. L. : L’acquisition du bâtiment a mobilisé 1 M€ une enveloppe similaire est à prévoir pour les salles blanches et les équipements. Nous avons une trésorerie saine et des capacités d’autofinancement. Cette année, le résultat net avant impôts s’est établi à 1,4 M€, une bonne performance qui nous donne des marges de manœuvre. Sur le montage à prévoir pour financer la croissance, la réflexion est en cours. Notre capital 100% familial nous garantit la maîtrise de nos décisions pour pérenniser Teknimed.

EMP : Comment évolue la recherche dans votre métier ?

C. L. : La voie de la biologie s’imposera à terme. Le parcours est long avec comme principal frein la réglementation mondiale qui complique les enregistrements. En attendant cette rupture technologique, nous avons en portefeuille une vingtaine de projets innovants, plusieurs produits en R&D avancée. En 2014, nous allons développer la partie textile avec des produits pour l’orthopédie et le rachis. Nous avons sorti la gamme polymère Biofuz® avec vis et plaque très avant-gardistes ; ce matériau employé pour la chirurgie du poignet  se résorbe dans le temps. Il  a été breveté et a obtenu le  marquage CE mi-2013.  L’essai clinique est en démarrage, la commercialisation suivra ensuite.

Quant aux ciments pour le rachis, ils font l’objet d’une R&D continue. Nous avons mis au point le ciment Résilience®, une solution avec des propriétés élastiques (et donc d’amortisseur) ce qui tend à limiter les risques de fractures adjacentes. En cours de validation clinique, cette formulation admet les propriétés mécaniques très proches de l’os.  La liste des nouveautés est longue, je pourrais citer encore le Neogel®, un substitut osseux qui favorise la croissance de l’os, le Bonefuse® Putty une sorte de «une sorte de pâte à modeler pour comblement osseux et le S5®, injecteur mélangeur breveté pour l’application de ciments dans les vertèbres équipé d’un système de sécurité à  débrayage automatique sécurisant le chirurgien dans l’acte médical.

EMP : Votre marché est international, comment diffusez-vous vos produits ?

C. L. : Nous avons 4 canaux, le réseau de distribution, les contrats à marque blanche, la fabrication sur mesure et nos filiales. Teknimed INC a été ouverte il y a un an à Chicago pour adresser directement les cliniques et les hôpitaux américains. Une autre filiale est en cours de création en Chine, dans la ville de Canton. Nous avons 130 clients en portefeuille. Je souhaite augmenter la part du CA généré par le réseau de distribution ainsi que celle découlant de la vente directe de nos filiales. Notre activité sur-mesure, axée en grande partie sur le rachis, sera de plus en plus basée sur des relations partenariales. Dans ce domaine, nous avons plusieurs références clients dont Johnson & Johnson, Medtronic, Alphatec…

 

EMP : Comment abordez-vous 2014 ?

C. L. : Nous voulons mettre en avant la signature Teknimed, conforter le positionnement international de la marque synonyme de haute technologie. Des produits uniques, à forte valeur ajoutée comme le Resilience® contribueront à accroître notre rayonnement mondial. En interne, je dépense beaucoup d’énergie pour bien orchestrer l’entreprise, que chacun se sente bien dans son travail et puisse y exprimer son talent et ses compétences.

Emma Bao
Diffusé le 3-12-2013

 

Encadré 1

Parcours

De l’architecture aux biomatériaux : savoir manager

 

 

Cette architecte de formation qui a complété son cursus par un MBA en management obtenu à l’INSA, a exercé son métier pendant une douzaine d’années avant de venir relayer son père, le fondateur de la société. Une décision mûrement réfléchie car elle ne manquait pas d’opportunités professionnelles dans son propre métier. La bonne santé de la PME familiale et tout le potentiel qu’elle recelait l’ont incitée à prendre le pilotage du navire, une aventure qui requiert les mêmes qualités que celles qu’elle déployait auparavant, une aptitude à bien manager et un sens de la communication. Cette jeune dirigeante de 37 ans a su insuffler une nouvelle dynamique à cette PME qui excellait déjà sur plusieurs fronts comme l’innovation,  la qualité de production, l’exportation…

 

Encadré 2

Un fonctionnement sur 2 sites.

La fabrication des biomatériaux s’effectue à L’Union (31) puis les produits partent en stérilisation, une étape sous-traitée. Ils sont ensuite envoyés sur l’établissement de Vic-Bigorre qui assure le contrôle, le stockage en semi-fini, la mise en boîtes et les expéditions. Sur le 65 sont concentrés le service financier, la qualité, le conditionnement, la logistique, le traitement des commandes. A Toulouse sont basés le service commercial et le SAV, la qualité, la R&D, les affaires réglementaires, le service clinique, la production et le marketing.

Encadré 3

Une offre globale par pathologie

Sur la partie « spine », Teknimed a développé des ciments, des substituts osseux et une instrumentation spécifique. L’orthopédie et traumatologie dispose d’une même famille de produits mais adaptés aux spécificités de la discipline avec en plus les polymères et la ligamentoplastie. En fait, pour chacune des autres pathologies adressées a été conçue une ligne complète de biomatériaux.

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