ECONOMIE : Marc Touati, invité des clubs APM : quelle thérapie de choc pour guérir la France ?

 
Bernard Touati, président fondateur du cabinet conseil Acdefi (Aux commandes de l’économie et de la finance)


Plusieurs Clubs APM de Toulouse et de la région se sont réunis au Domaine de Rochemontès à Seilh pour rencontrer Marc Touati, un expert économique de renom, venu débattre autour de son dernier ouvrage : « Guérir la France : la thérapie de choc ». En préliminaire, un note optimiste a été introduite sur les crises, des épisodes cycliques, naturel, qu’il faut appréhender comme des phases d’opportunité pour préparer l’avenir, investir, innover…Eloge a aussi été fait des entreprises françaises,  plus compétitives que les autres car elles doivent affronter une croissance zéro (0,3% / an depuis 2008) et un environnement fiscal des plus défavorable !

La France où il faut bon vivre est une grande malade qui s’ignore…victime de son immobilisme et engourdissement. L’heure du réveil a sonné, il est urgent de réformer en profondeur le pays pour retrouver de la vitalité, de l’élan. La loi Macron fait office « d’aspirine » face à l’ampleur du mal ! Et ce simple cachet est dur à faire avaler !

Ne pas oublier : à rendement élevé, risque élevé !

Faisant allusion à la dernière crise majeure où les subprimes ont joué le rôle de détonateur, Marc Touati a rappelé une règle économique de base : plus le rendement d’un placement est élevé, plus le risque est grand. Or les mathématiciens et ingénieurs financiers ont transfiguré ce principe avec de la titrisation de dettes (Sicav monétaires dynamiques…). Actuellement, c’est le phénomène inverse (également dangereux) qui se produit avec des bons du trésor à rendement quasi nul. Si l’onde de choc de 2009 a été d’une ampleur comparable à la crise de 1929, le remède employé, la relance budgétaire, a fait la différence. 5000 Mds de dollars (1000 en Europe) ont été injectés, les taux d’intérêts sont maintenus au plus bas (proche du zéro), la planche à billets a été fortement activée. « La dette est saine si elle génère une croissance suffisante pour rembourser les intérêts » note au passage Marc Touati. Si la recette pour faire repartir la machine a bien marché ailleurs, elle est restée pratiquement sans effet sur la zone euro (1% de croissance) et tout particulièrement en France. Alors que les voyant sont au vert (baisse des cours du pétrole, des matières premières, de l’euro, des taux d’intérêt…) et que la croissance mondiale depuis 2014 oscille autour des 3%, le pouls de la France bat toujours à un rythme faible (0,3% de croissance en moyenne depuis 2008), s’accélérant à peine cette année (1,2% attendus). L’Europe ne représente plus que 11,5% du PIB mondial. Ce sont les pays émergeants qui comblent les besoins en cash des Etats sur endettés, qui investissent dans les entreprises. La Chine, l’Inde ont des réserves de change et d’or les plus élevées.

Malgré un environnement favorable, notre économie ne réagit plus !

Si on a su gérer une récession en 2009, une deuxième sera plus dure à encaisser. Le niveau de chômage est alarmant dans plusieurs pays de l’Euroland. En France, le taux de chômage continue à grimper (10,5 % actuellement, 22% en intégrant toutes les catégories A à E) ;  25% des demandeurs d’emploi ont moins de 25 ans (1). C’est à 30 ans qu’on décroche en moyenne le premier CDI. Les dépenses publiques sont abyssales, atteignant 57,2% du PIB ! 70% des budgets des collectivités sont affectés aux dépenses de fonctionnement. Les prix de l’immobilier sont trop haut comparés aux revenus. La pression fiscale bat des records, le taux des prélèvements obligatoire s’élève à 45% du PIB contre 34% en moyenne dans les pays de l’OCDE.

Cet enlisement n’est pas une fatalité. Il faut une thérapie de choc pour inverser la tendance, changer la donne.

Marc Touati préconise une baisse des impôts pour tous, de la dépense publique, du coût du travail. Il faut moderniser le droit social, supprimer les 35 heures, innover, faciliter le financement de l’économie, faire de l’euro une arme pour la croissance….Une dose d’inflation (2,5 à 3%) serait aussi la bienvenue pour dynamiser l’économie.

Quant aux entreprises, elles doivent déployer des stratégies anti-crise, parier sur des marchés de niche innovants, communiquer, s’investir en R&D, aller à l’international…

Interrogé sur UberPop, Marc Touati a mis en cause l’absence de fluidité, les rigidités réglementaires qui favorisent l’éclosion de pratiques parallèles. Sur la question des loyers, l’insuffisance de l’offre encourage l’envolée des prix.

En termes de prédictions, une bulle financière est à craindre, les marchés boursiers s’emballent sans raison. A surveiller aussi les USA qui essuient une crise tous les 33 mois en moyenne. Leur marge de manœuvre est de plus en plus étroite pour  repartir. Et si on évoque la Grèce, sortir temporairement de la zone euro serait salutaire pour toutes les parties prenantes.

(1) : en Espagne le taux de chômage est de 23,5% : la moitié des demandeurs d’emploi sont des jeunes

 

 

 

Encadré

A propos de l’APM

Réseau international de dirigeants s’engagent à se perfectionner pour faire progresser durablement leur entreprise, l’APM rassemble 6700 entrepreneurs francophones répartis dans 349 clubs (présence dans 22 pays). Chaque club accueille une vingtaine d’adhérents, des structures volontairement réduites pour favoriser le partage d’idées et d’expériences managériales. On recense en région une dizaine de clubs, Toulouse en compte cinq  soit quelque 90 dirigeants. Une fois par mois, les adhérents rejoignent leur club APM local pour une journée de formation, de « respiration » aiment-ils à souligner. Car, on ne parle pas seulement économie ou management mais on repense la culture, la société, les différences, le monde, les relations humaines…La présence d’experts de tous horizons participe à cette aération de la pensée, à cette ouverture d’esprit qui permet d’appréhender les situations professionnelles avec d’autres prismes d’analyse. Les membres de l’APM partagent aussi une éthique commune basée sur le respect des personnes, l’exemplarité, la confiance partagée, le progrès de son entreprise…

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