Loin du tout-industriel, la biscuiterie Deymier de Carmaux (Tarn) cultive son inamovible savoir-faire autour de l'échaudé et du biscuit à l'anis depuis 103 ans. On vous raconte son histoire.
Marie, Véronique et Rémi Deymier sont les héritiers d'une tradition familiale bien ancrée à Carmaux et dans le Tarn : les échaudés ! (Photo : Anthony Assémat - Entreprises Occitanie)
Au coeur du Carmausin, là où Jean Jaurès a cultivé autant sa gouaille que sa légende politique, Véronique Deymier accueille ses visiteurs sans chichis ni apparats. Le président du Conseil départemental du Tarn, le socialiste Christophe Ramond, est une vieille connaissance de la famille ? Le tutoiement est de rigueur et il est invité lui aussi à fabriquer, le temps d'une visite, de mythiques "Jeannots", ces petits échaudés qui font la réputation de la biscuiterie Deymier. A l'entrée de la petite boutique, est affiché le menu d'un repas de 1662 auquel a assisté Pierre-Paul Riquet, le concepteur du canal du Midi. En "entremets de douceurs", figuraient déjà des échaudés...
"L'échaudé date du Moyen-Âge et il possède un lien fort avec le territoire car c'était le goûter des mineurs : la gamelle en fer avec du vin, plus les échaudés", rappelle Véronique Deymier.
Cinq générations aux manettes
Véronique, Rémi et leur fille Marie - "je baigne dans cet univers depuis toute petite, je dormais quelquefois sur les sacs de farine avant d'aller à l'école !" - sont les trois salariés de la biscuiterie Deymier. A Carmaux, mais plus globalement dans le Tarn nord et l'Aveyron, la réputation de la maison n'est plus à faire. L'entreprise fut créée en 1920 par Charles Deymier et le trio tarnais symbolise la 5e génération aux manettes de la biscuiterie. Si l'anis est importé de Marseille, le reste de l'histoire appartient au terroir tarnais avec une recette inamovible depuis 103 ans et avec cette particularité de l'échaudé que la pâte cuit deux fois (une des deux cuissons est obtenue par l'immersion dans l'eau bouillante). "Nous proposons quatre produits différents : l'échaudé classique, le gros échaudé sans anis mais parfumé à la fleur d'oranger, le Charlot ordinaire et le Charlot supérieur", expliquent les trois passionnés de la famille. L'échaudé, qui présente une bonne conservation, se savoure aussi bien à l'apéritif, avec une salade ou en dessert.
Ils fuient la grande distribution
Tout, dans le petit atelier carmausin, respire l'authenticité, la simplicité et le poids de l'histoire. Ici, pas de benchmark ni de marketing, et encore moins de grande surface.
"Nous avons eu une mauvaise expérience du réseau de la grande distribution et nous sommes revenus à des choses simples avec une vente de produits dans notre boutique et sur les marchés tarnais d'Albi, Carmaux et Saint-Juéry, ainsi que celui de Réquista dans l'Aveyron", précisent Rémi et Véronique Deymier.
Pas de budget promo non plus : tout passe par le bouche-à-oreille et la publicité favorable des habitants de Carmaux et des alentours lorsqu'ils voyagent en France ou à l'étranger.
Une production de 150 kg par semaine
Le four date de 1936 et le rituel de fabrication est immuable. 150 kg de produits sortent chaque semaine de l'atelier de la biscuiterie Deymier. L'échaudé est une belle tradition mais qui a tendance à s'effilocher. "Il y a 50 ans, nous étions quatre entreprises à en fabriquer sur Carmaux : il n'en reste plus que deux", rappelle Marie. "Ce sont des produits de qualité, avec des valeurs fortes. Les échaudés s'inscrivent dans ce patrimoine et cette excellence. C'est tout le sens de notre marque départementale Saveurs du Tarn", explique Christophe Ramond, précisant que Saveurs du Tarn et le Comité départemental du tourisme allaient se rapprocher.
En attendant, le roi du biscuit à l'anis - "l'échaudé est un biscuit, pas une pâtisserie !", précise Véronique Deymier" - va continuer de régaler Tarnais et Occitans. 103 ans de plus ? Qui sait ! En tout cas, Véronique Deymier prévient, tout sourire : "On ne peut pas rester sans échaudés à Carmaux !".